L’annonce du gouvernement gabonais d’interdire l’exportation du manganèse brut à partir du 1er janvier 2029 marque un tournant majeur dans la politique minière et industrielle du pays. Loin d’être une mesure isolée, il s’agit d’un choix stratégique visant à repositionner le Gabon dans la chaîne de valeur mondiale, en passant du statut de simple fournisseur de matières premières à celui d’acteur industriel à part entière.
Voici pourquoi cette décision est bénéfique pour le pays :
1. Créer de la valeur ajoutée sur le territoire national
Aujourd’hui, le Gabon exporte essentiellement du manganèse brut, sans transformation locale. Cela signifie que la plus grande partie de la valeur économique est captée à l’étranger, notamment lors des étapes de raffinage, de transformation industrielle ou de fabrication de composants (batteries, acier, etc.).
En interdisant l’export brut, le Gabon oblige les entreprises à investir localement dans la transformation, ce qui permet :
D’augmenter les recettes fiscales issues des activités à forte valeur,
De dynamiser les filières industrielles connexes (logistique, services, maintenance, énergie),
De renforcer la souveraineté économique.
2. Créer des emplois durables et qualifiés
Transformer le manganèse localement, c’est aussi créer de nouveaux métiers :
Opérateurs d’usine, techniciens de maintenance, ingénieurs de procédés,
Emplois dans la logistique, le transport, l’énergie, la sécurité, etc.
Contrairement à l’extraction brute, l’industrialisation permet de générer des emplois stables, mieux rémunérés et transférables dans d’autres secteurs, ce qui contribue à la montée en compétences de la main-d’œuvre nationale.
3. Développer une véritable industrie nationale
Le Gabon ambitionne depuis plusieurs années de sortir du modèle extractif basé sur l’exportation de ressources non transformées. Cette mesure s’inscrit dans la continuité des réformes passées (comme l’interdiction d’exporter les grumes en 2010) et vise à installer une base industrielle robuste.
À terme, cela permettra au pays de :
Attirer des investisseurs industriels de long terme,
Diversifier son économie, encore trop dépendante des matières premières,
Stabiliser ses recettes budgétaires, souvent exposées aux fluctuations des prix mondiaux des matières premières.
4. Renforcer la position du Gabon dans la chaîne mondiale du manganèse
Le manganèse est un composant stratégique, notamment pour la fabrication de l’acier et des batteries pour véhicules électriques. En transformant sur place, le Gabon pourra vendre des produits semi-finis ou finis, mieux valorisés et recherchés, ce qui lui donne un meilleur pouvoir de négociation à l’international.
5. Une vision à long terme, un pari sur l’intelligence économique
L’échéance de 2029 laisse le temps aux entreprises minières d’investir, au gouvernement de préparer les infrastructures (notamment énergétiques), et aux jeunes de se former pour intégrer ces filières.
Le succès dépendra notamment :
De la modernisation des infrastructures énergétiques,
D’un cadre fiscal stable et attractif,
Et d’une volonté politique constante de mettre la transformation locale au cœur de la stratégie industrielle.
Conclusion
En interdisant l’exportation du manganèse brut, le Gabon ne se ferme pas au commerce international — il choisit de peser davantage dans la chaîne de valeur, de créer des emplois chez lui, et de préparer un avenir industriel autonome.
C’est une réforme ambitieuse, mais nécessaire pour bâtir une économie plus résiliente, plus inclusive et plus souveraine.
Steeven BEKALE
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